Tristan Le Govic, harpiste aux nuances nordiques
Après une longue escapade écossaise et suédoise, l'artiste signe, avec Lise Enochsson, un disque élégant, mêlant couleurs et rythmes scandinaves et bretons.
Loin des sentiers battus, le harpiste lorientais Tristan Le Govic a l'esprit voyageur. Sans pour autant trahir ses origines. Depuis la découverte de son instrument au Festival Interceltique, l'avoir appris au Conservatoire de musique traditionnelle de Soye, puis à l'école de musique, il suit une route personnelle.
Après de longues escapades - six ans en Écosse, deux en Suède - il vient de poser ses valises à Melrand et de signer un nouvel album, Elva : « Cela signifie onze en suédois. Il y a onze titres. L'horloge sur la pochette marque onze heures. Ce chiffre me suis », glisse-t-il.
Sur ce disque dépaysant, il a amené dans la voix de la chanteuse suédoise, Lise Enochsson, une dynamique scottish norvégienne. « Entre les îles Shetlands écossaises et les Norvégiens, il y a beaucoup en commun, comme cette scottish, danse que l'on retrouve un peu partout en Europe. »
Voyages dans l'espace et le temps
Tristan Le Govic aime cultiver les notions de proximité et de lointain, mêler accords familiers et notes singulières, les variations entre majeur et mineur. « Des modes très exotiques pour nos oreilles. C'est très séduisant, avec un petit côté nostalgique. »
C'est un disque de voyage. « Cet album a été enregistré à la fois en Bretagne, en Écosse et en Suède. Dans le voyage, il y a toujours une part que l'on laisse derrière soi et le besoin de retrouver des amis. » Les couleurs y sont diverses, comme dans ce chant gaélique traduit en suédois. « Un thème des îles Hébrides, cher à Lise. Elle a voulu le traduire pour le chanter. Le texte est symbolique, car il parle d'un marin qui voyage de l'Écosse vers la Norvège. »
Autre sentier plus que buissonnier, une escale ukrainienne. « Avec un chant qui fait partie du répertoire d'un petit village, l'héritage d'une colonie suédoise qui y a émigré, et l'a conservé, une aventure dans la tradition Viking ! »
Mais le harpiste n'est pas prisonnier du passé. « Dans les polskas, il y a un jeu entre l'espace et le temps, le présent et le passé, la tradition populaire et le côté jazz ragtime, du jazz à l'ancienne. »
La harpe ne suit pas, elle mène la danse, rompant avec sa réputation d'instrument mélancolique. « J'ai une approche rythmique de la harpe. On dit que c'est un instrument à cordes pincées, mais dans les basses, c'est une percussion, avec un martèlement. Le jazz, c'est la petite influence que m'ont léguée Stuart Macpherson, le contrebassiste, et Roy Shearer, le percussionniste. Ils font partie de la scène du jazz écossais. »
Autre moment inattendu, une évocation de la catastrophe de Fukushima. « Cela fait partie de la tradition des bardes de raconter aussi l'histoire, de se mêler de la vie. La musique traditionnelle, c'est super, mais il faut aussi amener des choses modernes, sinon demain, on n'aura plus de traditions à exprimer. » Mais Tristan Le Govic n'a rien perdu de sa fibre bretonne. « Dans la proximité, il y a une marche de Polig Monjarret, et une gavotte pourlet, l'emblème du cercle Bugale Melrand. Avec deux superbes sonneurs, André Le Meut et Pascal Lamour, qui semblent parfois arriver de loin. Il y a aussi la voix de Lise, très proche, en évitant toute réverbération. »
[translation]
Tristan Govic, harpist with Nordic tonalities
After a long Scottish and Swedish break, this artist released, together with Lise Enochsson, an elegant recording mixing Scandinavian and Breton colours and rhythms.
Off the beaten track, but without betraying his origins, Lorient harpist Tristan Le Govic has the spirit of a traveller. Since the discovery of his instrument at the Festival Interceltique, having studied it at the Traditional Music Conservatoire of Soye, then at the city's Music School, he now follows a personal path.
After long breaks - six years in Scotland, two in Sweden - he just settled down in Melrand and released a new album, Elva: "It means eleven in Swedish. There are eleven tracks. The clock on the cover marks eleven. This number follows me", he says.
In this exotic recording, through the voice of Swedish singer Lise Enochsson he brings a dynamic Scottish from Norway. "There is much in common between the Shetland Islands of Scotland and Norway, such as the Scottish dance found all over Europe."
A journey in space and time
Tristan Le Govic likes cultivating notions of proximity and distance, mingling familiar chords and singular notes, variations between major and minor. "Those modes are very exotic to our ears. They are very attractive, with a touch of the nostalgic."
Recording a journey. "This album was recorded in Brittany, Scotland and Sweden. In a trip, there is always a part left behind and the need to catch up with friends again." There are many colours, like in this Gaelic song translated into Swedish. "A tune from the Hebrides dear to Lise. She wanted to translate it to sing it. The text is symbolic, it tells us of a sailor travelling from Scotland to Norway."
Another off-path element, a Ukrainian pause. "A song which is part of the repertoire from a tiny village, the legacy of a Swedish colony who emigrated, and kept it; an adventure in true Viking tradition!"
But the harpist is not a prisoner of the past. "In the polskas, there is a gap between space and time, past and present, the folk tradition and ragtime, like the old jazz."
The harp does not follow, it leads the way, breaking with its reputation of being a melancholic instrument. "I have a rhythmic approach to the harp. It is said that it's a plucked string instrument, but in the bass, it is a pounding percussion. Double bass player Stuart Macpherson and percussionist Roy Shearer from the Scottish jazz scene influenced me in that jazz style."
Evoking the Fukushima disaster is another unexpected moment. "It's part of the tradition of the bards to also tell the history, to get involved in life. Traditional music is great, but one must also play modern things, otherwise, tomorrow, we will have no tradition to perform." But Tristan Le Govic has lost none of his Breton fibres. "There is a march of Polig Monjarret, and a gavotte Pourlet, the emblem of the Bugale Melrand circle. With two superb musicians, André Le Meut and Pascal Lamour, who at times seem to sound from afar. There is also the very close voice of Lise, avoiding reverb."